Docteur Knock, Anticancer
C'est de la bombe.
Non, pas le livre. Je me tâte encore pour savoir qu'en penser.
La bombe, c'est la chronique de Guillaume Erner ce matin sur France Inter, Eclectik :
Voici la puissance de la maladie puisque donc, David Servan-Schreiber a sorti un livre de thérapie par le rire qui s'appel "Anticancer".
En ce moment Rebecca, tout le monde est malade, et c'est la raison pour laquelle j'ai décidé d'évoquer aujourd'hui un livre rempli de conseils pour guérir, je veux parler "d'Anticancer", le dernier ouvrage de David Servan-Schreiber. Alors je précise d'emblée qu'Anticancer est un livre bourré d'optimisme, enfin disons plus optimiste que "Le pavillon des cancéreux" de Soljenitsine, puisque comme on s'en souvient chez Soljenitsine, Roustanov et Kostoglorov, malgré leur leucémie, se font la gueule, il fait froid et en plus, y a plus de vodka.
Plus rigolo que Soljenitsine donc, plus concis, aussi Servan-Schreiber pense que notre décès par cancer n'est pas inéluctable, mais seulement, disons, probable. Avec Servan-Schreiber, finie la médecine Bisounours, celle qui rappelle que l'espérance de vie ne fait qu'augmenter, finie cette tranquillité béate sous prétexte que la recherche contre le cancer a fait des progrès et refait la salle à manger de Croze-Marie.
N'écoutez pas ces charlatans, nous dit David Servan-Schreiber, authentique disciple du grand Docteur Knock. Le docteur Knock nous expliquait, je cite, que "les gens bien portants sont des malades qui s'ignorent", un propos que Servan-Schreiber traduit par, je cite la première phrase de son livre : "Nous avons tous un cancer qui dort en nous". Un cancer qui dort, je vous préviens, si vous bouger, ça va réveiller votre cancer ! Comme le dit Servan-Schreiber, la maladie touche des gens de plus en plus jeunes, des gens qui n'ont jamais fumé, bref je veux pas vous inquiéter, mais désormais les nouveaux malades sont en pleine santé !
Pire encore, une personne sur quatre a un cancer, ce qui installe une certaine tension quand on dispute un double au tennis. Pourtant, le pire dans cette histoire de cancer, ce serait de vous inquiéter, parce que le stress, figurez-vous que c'est une cause de cancer. Moi je dis ça, mais c'est pas pour vous faire du mouron, de toutes façons c'est très rare, les gens stressés.
Autre scoop contre le cancer, il faut faire de l'exercice physique, mais alors là attention c'est pas simple. Contre le cancer du rectum, il faut marcher une demi-heure par jour. Contre celui de la prostate, il faut faire du jogging pendant une heure, bref, quand on pense à la maladie de Mitterrand on comprend pourquoi Sarkozy passe sa vie à courir. Mais si vous n'aimez pas courir, nous dit Servan-Schreiber, remplacez ça par de l'exercice, par exemple, je cite, page 88, "sortir les poubelles". Alors ça j'avoue que j'ai pas très bien compris pourquoi, mais de toutes façons, il y a un moment ou cancer ou pas cancer, faut bien descendre la poubelle.
Alors je me permettrai juste d'ajouter deux conseils. Premièrement, si vous êtes à la Hague, le nucléaire a beau être sans danger, prenez quand même votre sarcophage en béton avant de descendre les déchets, sinon vous risqueriez d'attraper froid. Segundo, si vous êtes déjà en chimio, quand vous descendez les poubelles, mettez un bonnet parce que sinon, en plus de votre cancer, vous allez nous attraper froid au crâne. Par ailleurs, si vous tenez à survivre, arrêtez de bosser : mourir en bonne santé, c'est un job à temps plein.
Alors je vous résume ce qu'il faut faire : d'abord, le sucre, hein, vous oubliez, vous remplacez ça par du sirop d'agave, le soir vous avez droit à du hoummous sur du pain multi-céréales, l'eau, il faut la filtrer avec un filtre à osmose inversée, veillez à manger beaucoup de quinoa, des framboises et du cucurma en poudre. ATTENTION ! du cucurma en POUDRE ! Surtout pas en gélules parce que ça fonctionne pas, et puis du beurre bleu-blanc-coeur, je vous assure, un label accordé aux produits issus d'animaux partiellement nourris aux graines de lin. Alors depuis que je sais qu'il faut être suicidaire pour consommer du beurre non-issu d'un animal qui mange des graines de lin, c'est simple, j'ai acheté une vache et je la nourris avec mes chemises, je vais beaucoup mieux !
Alors, en consultant cette liste d'ingrédients, on pourrait se dire que finalement David Servan-Schreiber nous livre une version New-age du bain de siège de Rika Zaraï.
Mais il y a autre chose dans ce livre, l'idée que le cancer est la conséquence de notre style de vie, et qu'en somme, une fois informés, c'est notre responsabilité de devenir malades ou de rester en bonne santé. Finalement, guérir du cancer c'est une question de formation et de volonté, comme trouver un emploi ou réussir sa carrière. Ainsi le cancer de Servan-Schreiber est une maladie du capitalisme libéral où chacun se retrouve seul face à son destin.
D'ailleurs dans une interview au Nouvel Observateur, notre nouveau Docteur Knock donne le conseil suivant aux malades, je cite : "oubliez l'état, agissez vous-mêmes, prenez-vous en main". Prenez-vous en main, dit-il, car, sans vouloir vous stresser, la main invisible de la maladie saura reconnaître les siens...
Brrrrrr....